Le laboratoire vivant du projet SUPERB – BOCAGE FORESTIER en Nouvelle-Aquitaine présente les inventaires de biodiversité en cours et le périmètre de sa zone de démonstration.
La nouvelle stratégie de l’UE pour 2030 entend renforcer les mesures de protection et de restauration des forêts de l’UE, propices à leur résilience pour maintenir leurs fonctions socio-économiques et environnementales. Il s’agit également d’un marché de plusieurs milliards d’euros en devenir qui requiert la définition de méthode fiable tant pour le propriétaire que le gestionnaire forestier. L’approche active par la plantation a déjà fait ces preuves dans la restauration des terrains de montagne et autres milieux sensibles ou dégradés, mais d’autres méthodes restent à explorer pour s’adapter toujours mieux au contexte d’incertitude climatique. Ainsi, même les forêts de productions qui sont parfois plus exposées à certains risques doivent chercher à remettre en question la durabilité de leurs pratiques. Nous proposons de vous partager une initiative en cours sur le territoire des Landes de Gascogne (France), le Laboratoire vivant BOCAGE FORESTIER animé par l’IEFC.
Les Landes de Gascogne est un territoire de 1,5 M d’ha recouvert de forêt sur 73% de sa surface dont près de 90% sont des plantations de pin maritime en monoculture. Cette faible diversité en espèces comme en structure alliée à une gestion intensive de la ressource expose ces terrains à de forts risques biotiques, mais aussi aux tempêtes et aux incendies. C’est une approche paysagère de la restauration qui a ici été proposée en s’inspirant du système ancien de bocage agricole. Les lisières d’arbres en bordure de parcelle sont, en effet, connues pour leurs nombreux bénéfices, même en milieu forestier : refuge de biodiversité (papillons, oiseaux, etc.), protection contre les ravageurs, atténuation du risque de chablis, effet barrière contre l’incendie. C’est pour vérifier ces effets dans le contexte landais que le projet BOCAGE FORESTIER a été créé, porté par l’INRAE, la coopérative Alliance Forêt-Bois et l’IEFC.
L’intérêt du projet est de diversifier les espèces arborées présentes dans le paysage tout en augmentant l’hétérogénéité et la connectivité des lisières à l’échelle du paysage afin de maintenir une forte capacité de production à l’échelle des peuplements. Une zone de démonstration de 50 000 ha a été définie en sud Gironde, dans laquelle deux études sont menées en parallèles :
– La première consiste à vérifier le rôle des haies anciennes en quantifiant leur contribution à la conservation de la biodiversité et à la protection des plantations de pins adjacentes. Un premier travail cartographique a permis de révéler l’existence de lisières matures sur le territoire. 36 d’entre elles ont été sélectionnées pour être l’objet d’un inventaire biodiversité selon différentes modalités de connectivité et de densité des îlots feuillus. L’inventaire de biodiversité effectué par l’INRAe comprend l’échantillonnage des populations d’araignées, carabes, insectes volants, chauves-souris, oiseaux et autres groupes taxonomiques dont vous pouvez retrouver le protocole vulgarisé sur notre site.
– La deuxième réalisée par Alliance Forêt Bois consiste à réaliser des essais de plantation de nouvelles haies pour résoudre les questionnements techniques sur la conception, la préparation et l’installation d’un tel linéaire. L’objectif est d’en installer 10 km sur la zone démo avant 2025 afin de fiabiliser une méthode opérationnelle, facilement déployable auprès des propriétaires forestiers des Landes.
Le Laboratoire Vivant animé par l’IEFC, combine des actions d’expérimentations avec la concertation des parties prenantes locales pour s’enrichir des expériences et avis de chacun (décision quant au choix des essences à planter, périmètre, options techniques) et ainsi s’assurer d’une meilleure adhésion aux résultats du projet. Deux ateliers se sont déjà déroulés en septembre 2022 et 2023 pour réunir une grande diversité d’acteurs du territoire et les tenir informés des avancées du projet.
La dernière réunion du 7 septembre a été l’occasion pour l’équipe du projet de présenter l’avancée des différentes activités en cours et d’écouter les réactions et suggestions des participants. Il en ressort que la priorité avant de chercher à améliorer la connectivité des lisières, devrait toujours être de préserver l’existant. La cartographie des parcelles feuillues sur la zone démo réalisée en début de projet détient de ce fait une information précieuse qui doit être largement communiquée. Il serait également pertinent de s’intéresser aux ressorts sociologiques pouvant expliquer le maintien (volontaire ou non) de ces linéaires feuillus par les propriétaires privés. Il peut s’agir de bordures de propriétés, d’anciens pâturages ou fossés, de ripisylves, etc. dont l’historique et les motivations de conservation sont des données importantes pour mieux comprendre l’objet d’étude.
Enfin, le comité a souhaité dès à présent réfléchir au déploiement des résultats auprès des propriétaires forestiers. Bien que le calendrier soit serré, la restauration prochaine des parcelles incendiées durant l’été 2022 est une opportunité unique pour coordonner les efforts de restauration de ce maillage feuillus. Un travail ciblé auprès des propriétaires et des pouvoirs publics doit être mené au printemps prochain.
Une troisième réunion est déjà prévue à l’automne 2024 pour présenter les résultats consolidés du travail d’inventaire de la biodiversité et les recommandations de déploiement des plantations de lisière.
Enfin, ce travail Aquitain est rattaché à un réseau européen d’expérimentation de méthodes de restauration forestière, coordonné par le projet de recherche SUPERB que nous vous avons déjà présenté. Avec 12 zones de démonstration dans autant de pays et des enquêtes de grande envergure pour recenser les expériences externes, le projet SUPERB a pour ambition de produire une plateforme pour proposer des solutions de restauration adaptées et clefs en main aussi bien pour le gestionnaire, le propriétaire que le financeur. N’hésitez pas à vous rapprocher de notre institut ou du coordinateur, l’EFI pour en savoir plus.
Benoît de Guerry, IEFC